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La forêt tropicale de Guyane et sa biodiversité

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Découverte des forêts subtropicales, la biodiversité époustouflante, combien d'espèces vivent en Guyane, les mammifères, la déforestation....

J'ai pensé utile d'éditer ce dossier réalisé par François Catzeflis (Biologiste Directeur Recherche CNRS) dans cette rubrique mais je compte mettre un lien dans le forum sur la biodiversité... juste pour bien insister sur la synergie qui existe entre toutes les espèces végétales et animales...

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Les régions tropicales sont théoriquement celles situées entre le Tropique du Cancer ( 23°27’N) et le Tropique du Capricorne ( 23°27’S). Ces régions tropicales sont en grande partie - mais pas entièrement - recouvertes de forêts tropicales, qui couvrent environ 17 millions de km2.

Parmi celles-ci, les forêts tropicales humides de plaine (lowland rainforests) existent sur les trois masses continentales contenant l’aire des tropiques, et couvraient en 1990 7.2 x 106 km2, soit 41% de toutes les forêts tropicales. Avant l’an 1500, ces forêts humides de plaine s’étendaient sur 9.0 millions de km2 et se distribuaient ainsi :

- aux Amériques, avec les forêts néotropicales, env. 5.0 x 106 km2, soit la moitié du total mondial (ou 8 fois la France) ;
- en Afrique, avec env. 1.5 x 106 km2, centrés autour du bassin du Congo ;
- enfin dans les tropiques orientales, autour de l’archipel de Malaisie, avec env 2.5 x 106 km2.

La différence (7.2 versus 9.0 millions de km2) correspond aux 1.8 x 106 km2 perdus entre l’an 1500 et 1990). Tableau synthétique : En millions de km².
En 1990ToutesLowland rainforests
Afrique


5,3



0,9
Asie continentale


1,4



0,3
Asie insulaire


1,7



1,4
Amérique centrale


1,2



0,5
Amérique du Sud


8,0



4,1
Total


17,6



7,2


Années15001990
Afrique
1,5

0,9
Asie
2,5

1,7
Amériques
5,0

4,6

Forêts tropicales humides de plaine (millions de km²)


Durant ces cinq derniers siècles, les forêts primaires ont été profondément modifiées par diverses activités humaines. En vert, les grands blocs de forêts encore intacts (2008). En rouge, les forêts altérées (exploitées, en exploitation, ou simplement disparues ...).

Futura Sciences 2008 - édité sur LANE 2012

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La première découverte de forêts tropicales et dont il reste des traces écrites est une narration qui a plus de 2000 ans.

En 327 avant JC, les troupes d’Alexandre le Grand franchissent la célèbre Khyber Pass (entre Afghanistan et Pakistan), débouchent dans le Punjab, et continuent jusqu’aux rives aval de l’Indus. Des textes relatent des mangroves et des marais boisés, des manguiers, des bananiers, et des banyans. D’ailleurs, le mot «jungle», qui fait allusion a une forêt lianeuse et buissonnante de pénétration difficile, est dérivé de l’Hindi «jangal».

Les régions forestières néotropicales ont eu une influence considérable sur le développement de la biologie du 19siècle. La biogéographie et l’écologie se sont fortement appuyées sur les récits des voyages sud-américains de l’allemand Alexandre von Humboldt, et de son compagnon français Aimé Bonpland. Ce sont ces textes et lettres qui ont attiré l’attention de Charles Darwin et d’Alfred Russel Wallace sur la biodiversité – et l’évolution de celle-ci – en milieux forestiers tropicaux.

Tous deux, Wallace et Darwin, ont été impressionnés par l’extraordinaire richesse en espèces animales et végétales. Aujourd’hui, on estime que 50% à 70% des espèces vivantes en milieux terrestres se trouvent en forêts tropicales humides alors que ces dernières n’occupent que 7% des terres émergées. Une biodiversité aussi élevée ne se retrouve qu’en récifs coralliens.

En fait, une forte richesse en espèces pour de nombreux taxons non-apparentés est une caractéristique des forêts tropicales, en particulier des forêts néotropi-cales de plaine.

A ce propos, le terme français «forêt ombrophile tropicale» (forêt tropicale humide) correspond à l’anglais «tropical rainforest», une traduction de l’allemand «tropische Regenwald», tel que défini par le botaniste A.F.W. Schimper en 1898.

En Guyane francaise, comme dans la majeure partie du bassin amazonien, il s’agit de «forets equatoriales sempervirentes ombrophiles de plaine », ou en anglais « lowland tropical rainforests».

Futura Sciences 2008 - édité sur LANE 2012

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Quatre massifs forestiers sont reconnus et qui ont des compositions floristiques et faunistiques très différentes en Amériques tropicales :


En Amérique du Sud tropicale on reconnaît quatre massifs forestiers, dont le plus grand est celui du bloc amazonien. La courbe rouge délimite la « Région des Guyanes », une région caractérisée par certains peuplements végétaux et animaux. La Guyane française s’inscrit dans cette province biogéographique.
©️ Francois Catzeflis


Voici leur répartition, telle que connue avant les déboisements post-colombiens :

- le bloc amazonien,
- les forêts Atlantiques du sud-est du Brésil,
- les forêts côtières du nord du Venezuela,
- les forêts de plaine trans-andines et d’Amérique centrale.



Futura Sciences 2008 - Edité sur Lane 2012

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Parmi les quelques 250.000 espèces de plantes à fleur, envrion 170;000 (les 2/3) vivent sous les Tropiques, dont environ 85.000 en Amérique Centrale & Amérique du Sud.

En un site forestier tropical donné, disons de 1 hectare, la richesse spécifique en arbres varie de 23 (Nigeria) à 300 (Amazonie). Par comparaison, il n’existe que 50 espèces d’arbres dans l’ensemble de l’Europe. Ou encore, un maximum de 30 espèces d’arbres par hectare dans les forêts les plus riches d’Amérique du Nord (sud-est des Appalaches).

Dans les forêts de plaine amazoniennes les plus riches, sur un hectare, les ¾ des quelques 300 espèces d’arbres ne sont représentées que par 1 ou 2 individus. En d’autres termes, à l’échelle du km2, la majorité des espèces d’arbres tropicaux sont rares. Le concept européen d’identifier un type de forêt par son espèce dominante ne s’applique pas en Amazonie.

Plotkin & al. 2000 (PNAS-USA 97 : 10850 ->) comparent, à l’echelle de 50 hectares (= 0.5 km2), quelques sites tropicaux, quant aux arbres de diamètre supérieur a 1 cm :

Nombre d’arbres Nombre d’espèces
Barro Colorado (Panama)
235 317

305
Mudumalai (Inde)
17 432

68
Pasoh (Malaysie)
320 903

817
Lambir (Malaysie)
339 266

1171
HKK (Thailand) 96 072
251


Prenons quelques taxons animaux pour illustrer l’extrème richesse spécifique des forêts néotropicales :

Ce que nous appelons communément «Reptiles» (serpents, crocodiles, tortues) compte 5500 espèces au niveau mondial ; 1200 espèces en Amérique Sud, dont 550 en forêts néotropicales, dont 270 dans le bassin Amazonien de plaine ; dont 159 en Guyane. En France métropolitaine, il n’y a que 41 espèces de serpents et tortues.



La biodiversité des grenouilles est spectaculaire, et en saison des pluies les champs des grenouilles deviennent assourdissants. Cette « rainette patte d’oie » (Hyla boans) chantait tout près de mon hamac, et j’ai préféré déménager pour assurer la tranquillité de mon sommeil. ©️ François Catzeflis

Et du côté des « grenouilles » (Amphibiens anoures) : environ 4500 espèces vivantes sont connues aujourd’hui, dont 1600 en régions néotropicales. Rien qu’en Guyane, 103 espèces sont répertoriées, alors qu’on en connaît seulement 33 en France métropolitaine.

A l’échelle de la localité (= dans un rayon de 3 km), il y a 2 à 4 fois plus de vertébrés supérieurs (Mammifères, Oiseaux, Amphibiens, Reptiles) et 3 à 10 fois plus d’Arthropodes en régions tropicales qu’en régions tempérées.

En Amazonie, les sites les plus riches sont vers l’amont des affluents de l’Amazone, au pied des Andes : 550 oiseaux et 140 mammifères dans un rayon de 3 km à Cosha Cashu, au Pérou, à comparer avec 180 oiseaux (hormis les migrateurs non-nicheurs) et 66 mammifères pour toute la France continentale.

Nombres approximatifs d'espèces

Espèces Mondial Amérique du Sud Amazonie France Guyane
Plantes vasculaires
250.000
5.300
Reptiles
5.500
1.200
270
41
159
Amphibiens
4.500
320
33
103
Poissons
20.500
3.000
81
480
Oiseaux
9.700
3.000
545
740
Mammifères
4.800
1.150
139
186


Futura Sciences 2008 - Edité sur LANE 2012

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En plus du nombre élevé d’espèces d’arbres par hectare ou par km2, il faut dire un mot de la multi-stratification de la canopée.

Bien que très simpliste et réducteur, l’examen des strates de végétation selon l’axe vertical permet d’aborder l’énorme complexité d’une forêt tropicale. Certes, la forêt est dynamique avec des taches de différents âges du cycle de croissance, mais néammoins la notion de strates ou couches superposées est utile.

Une forêt tempérée, européenne ou nord-américaine, ne renferme que 3 strates : herbacées, buissons bas, et une seule couche d’arbres. La plupart des forêts tropicales contiennent 2 à 4 couches d’arbres, en plus des buissons et des herbacées. D’ailleurs, il apparaît, de façon très simpliste, que différents taxons d’arbres mâturent à différentes hauteurs :

- la plupart des Ebenaceae et Euphorbiaceae sont de petits arbres,
- la plupart des Lecythidaceae, Burseraceae et Sapotaceae sont de grands arbres,
- la plupart des émergents sont des Leguminosae et des Dipterocarpaceae.



Une forêt tropicale humide contient plusieurs couches d’arbres, ou plutôt plusieurs strates de végétation. Cette complexité multiplie les niches écologiques exploitables par les animaux, et donc permet la coexistence d’une énorme biodiversité. ©️ François Catzeflis

La complexité végétale de la forêt tropicale est entretenue perpétuellement par les chutes d’arbres, qui créent des chablis ou «forest canopy gap» à raison de 1% de la surface par an. Un vieil arbre tombant entraîne entre 3 et 10 autres arbres dans sa chute, et cette ouverture de la canopée amène la lumière abondante au sol, et la repousse rapide d’espèces pionnières.

En fait, le dynamisme de la forêt amène un patchwork d’ages du peuplement, avec tous les stades intermédiaires entre le jeune recru secondaire et la forêt primaire mature.




Parmi les rongeurs endémiques sud-américains, la famille des Echimyidae renferme de magnifiques « rats arboricoles ». Ici, Echimys chrysurus, le plus grand des 4 rats arboricoles rencontrés en Guyane française. Ce rongeur se nourrit principalement de jeunes feuilles et de bourgeons, et sa dentition (molaire) rappelle celle des éléphants. ©️ Simon Fellous, avec accord donné a Francois Catzeflis

C’est cette «multiplication des niches disponibles» qui entraîne par endroits une biodiversité animale qui est est spectaculaire.

Trois exemples :

1) en un site amazonien d’Equateur, 81 espèces d’Amphibiens, soit autant que pour tous les Etats-Unis...

2) sur un arbre en Amazonie péruvienne, E. D. Wilson a recueilli 43 espèces de fourmis, autant que la biodiversité de toute la Grande Bretagne...

3) sur 200 m d’un petit cours d’eau (largeur 2m), affluent du fleuve Mana en Guyane, on a dénombré plus de 70 espèces de poissons, soit l’équivalent de toute la faune piscicole (81 espèces) de métropole française.


Futura Sciences 2008 - Edité sur LANE 2012

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Réponse : par diverses spécialisations alimentaires, comportementales, spatiales. Les forêts tropicales fournissent un écosystème dont les trois dimensions sont énormes, avec une riche diversité en végétaux, et une multiplicité de ressources alimentaires différentes (mais pas forcément abondantes tout le temps !).

1 - spécialisation dans le temps : espècesdiurnes et nocturnes
- parmi les 86 mammifères non-volants de Guyane, 21 espèces sont diurnes, 52 sont nocturnes, et 13 sont à la fois diurnes et nocturnes. Auxquelles se rajoutent les 100 espèces nocturnes de chauves-souris.

2 - Spécialisation dans l’espace

Il faut dépasser la dichotomie simpliste terrestre/arboricole, pour reconnaître différentes strates offrant différentes niches. Au Gabon, les différentes espèces d’écureuils de taille similaire exploitent préférentiellement différentes strates de la végétation, alors que des espèces de taille très différente se partagent le même étage de végétation.

3 - Spécialisations alimentaires

Les chauves-souris sont la principale composante de la biodiversité des mammifères en Amazonie ; au moins 50% des espèces de mammifères sont des Chiroptères. Malgré une morphologie superficiellement semblable, des adaptations à au moins sept régimes alimentaires leur permettent de co-exister : frugivores, insectivores aériens, insectivores glaneurs, nectarivores, piscivores, sanguinivores, omnivores, animalivores glaneurs, ....

Un travail pionnier très souvent cité est celui de P. Charles-Dominique et coll. (1981), qui a illustré le partage de l’espace et des ressources pour une communauté de marsupiaux vivant en forêts secondaires pres de Cayenne.

Futura Sciences 2008 - Edité sur LANE 2012

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On découvre encore des nouvelles espèces de mammifères: au niveau mondial, à un rythme d’environ 46 espèces /an, pour la periode 1982 (4170) – 1992 (4629).

L’affirmation courante que les oiseaux sont aussi bien connus que les mammifères est contredite par les chiffres :

- environ 450 nouvelles espèces de mammifères de 1981 a 1990,

- 47 nouvelles espèces d’oiseaux de 1981 à 1990.

Or, la biodiversité mondiale des oiseaux (9600 espèces en 1990) est double de celle des mammifères (4600 espèces en 1990).

Ce sont dans les tiroirs des Musées qu’on découvre le plus de nouvelles espèces !

En 1992, 1145 mammifères étaient connus des régions tropicales d’Amérique Centrale et d’Amérique du Sud. En 1982, cette biodiversité était de 974 espèces, soit 15% de moins.

Durant ces onze années :

- 173 espèces nouvelles ont été découvertes dans les tiroirs des musées et dans les labos de systématique ...

Ces 173 espèces étaient précédemment considérées soit comme des sous-espèces soit comme des synonymes d’espèce «polytypique» . Ces découvertes ont donc conduit à une augmentation de la biodiversité connue, mais à une fragmentation ou subdivision des aires géographiques d’autres espèces.

- 60 espèces nouvelles ont été découvertes dans la nature, par des missions de collecte et d’inventaire de la biodiversité : augmentation de la biodiversité.

- 62 espèces (de 1982) ont été mises en synonymie : perte de biodiversité, mais augmentation des aires géographiques d’autres espèces.

Ces changements dûs aux efforts des naturalistes et des sytématiciens concernent donc 295 espèces, a savoir 26% des quelques 1145 mammifères reconnus en 1992 en zones néotropicales.

Chaque année, de nouvelles espèces de mammifères sont décrites d’Amazonie et des Guyanes, et pas seulement des souris ou des chauves-souris (« rats et bats»). Durant la période 1992 à 1998, 7 genres et 57 espèces nouvelles pour la science ont été découvertes sur le terrain ou en étudiant les spécimens en collections dans les musées. Au rythme moyen de 8 espèces par an, dans six ordres différents : certes, les rongeurs dominent (60%), en particulier les rats & souris (50%), mais il y a eu 4 marsupiaux, six primates, 3 insectivores, et 9 chauves-souris.

La plupart de ces nouvelles espèces ont été découvertes en forêts humide de plaine (26 en Amazonie et dans les Guyanes) et de montagne (12 dans les Andes), et ceci dans la majorité des pays d’Amérique centrale et d’Amérique du Sud.


Futura Sciences 2008 - Edité sur LANE 2012

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Quel est l’état de nos connaissances quant à la biodiversité des mammifères des forêts néotropicales ?

Probablement meilleur que celui de la plupart des invertébrés, mais nous savons encore trop peu de choses malgré deux à trois siècles de naturalistes amazoniens.

Dresser la liste des mammifères d’un site forestier néotropical n’est pas chose aisée ; les inventaires de terrain sont longs et coûteux, et puis de très nombreux taxons sont si mal connus qu’il faut ensuite un examen morphologique détaillé (au laboratoire) pour les identifier. Les frontières biologiques de beaucoup de taxons (espèces, sous-espèces) sont problématiques en l’absence de révisions taxonomiques, et ceci est surtout vrai pour les cas de parapatrie et allopatrie.

Voss & Emmons (1996) ont récapitulé nos connaissances, en analysant les faunes de la douzaine de localités néotropicales connues à ce jour. Si, dans une localité (rayon de 3km) d’une riche forêt de France, on peut recenser de 25 à 30 espèces de mammifères (sans compter les chauves-souris), en Amazonie la biodiversité va de 44 à 79 espèces.

Il y a très peu de stations biologiques dans les forêts primaires néotropicales. L’une d’elles est Barro Colorado, le long du canal de Panama, où des mammalogistes sont venus plus ou moins régulièrement depuis 1926, mais pendant longtemps sans but précis d’inventaire.

En 1996, 113 espèces de mammifères avaient été identifiées à Barro Colorado, à savoir la moitié (57 espèces) après 7 ans (1926-1932), et 80% après 37 ans (1926-1962) de présence sur le site. En considérant la répartition géographique des mammifères d’Amérique Centrale, on peut s’attendre à un total de 144 espèces à Barro Colorado ; c’est à dire que l’inventaire actuel serait complet a 78%, malgré 70 ans de présence naturaliste.

Mais la plupart des localités néotropicales où la biodiversité des mammifères a été comptabilisée sont des stations où des efforts d’inventaire ont été réalisés durant des missions définies, s’étendant sur 1 à 5 ans en général. Pour certains inventaires, les scientifiques ont laissé des notes suffisamment détaillées pour qu’on puisse quantifier leur effort de prospection.

C’est par exemple le cas de Balta, au Pérou ; de Cunucunuma au Venezuela, et du RioXingu, au Brésil. On voit ici qu’il faut en général un effort de 80 chercheurs X jour pour découvrir 50% de la faune, et de 150 chercheurs X jours pour comptabiliser 90% de la biodiversité locale. Peu de bailleurs de fonds, publics ou privés, peuvent aujourd’hui financer de telles recherches de terrain.


Récemment, une équipe de scientifiques new-yorkais de l’American Museum of Natural History (AMNH) a effectué une série de missions de terrain dans le but principal d’inventorier toute la faune des mammifères d’un site donné, et de pouvoir ensuite caractériser et discuter sa biodiversité dans un contexte amazonien.

Les travaux de terrain se sont déroulés de 1991 à 1994, dans un site de forêt primaire en Guyane française. Les premiers résultats ont été publiés en 1998 (chauves-souris) et 2001 (mammifères non-volants). En 202 jours de travail de terrain, avec 3 chercheurs en moyenne, 128 espèces de mammifères ont été capturées ou observées, auxquelles se rajoutent 14 espèces provenant d’interviews normalisés auprès des travailleurs forestiers locaux.

Diverses techniques d’échantillonnage standardisées ont été utilisées :

- pour les chauves-souris : filets en sous-bois ; filets aériens ; visites des sites de repos ;
- pour les mammifères non-volants : piègeages au sol ; piégeages dans les arbres ; pitfalls ; observations et tirs diurnes ; observations et tirs nocturnes ; interviews normalisés.

Donc, après un effort de 634 personnes X jours, une diversité de 142 espèces a été observée (mesurée), et un ensemble de 1400 specimens ont été récoltés pour documenter la taxonomie et la morphologie de cette faune.


Différents estimateurs non-paramétriques permettent d’extrapoler la diversité totale vivant à Paracou, puis de comparer celle-ci à la diversité attendue sachant les aires de distribution des espèces à l’échelle de la Guyane et des régions voisines.

Les valeurs extrapolées s’étendent de 155 à 168 espèces (4 estimateurs différents), et les valeurs attendues (d’après la distribution géographique globale) vont de 166 à 178 espèces.

La courbe cumulative des 128 espèces observées (sauf interviews) au cours des 202 jours de travail indique que 50% (64 esp.) de la biodiversité a été rencontrée après 50 jours, et que 90% (115 esp) des taxons sont observés après 130 jours de terrain.



Futura Sciences 208 - Edité sur LANE 2012

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Environ 190 espèces de Mammifères sont actuellement connues de Guyane française, soit autant que dans toute l'’Europe.

On ne peut pas comparer grand chose (les compositions taxonomiques sont trop différentes !) entre l’Europe et la Guyane, mais il est frappant de noter que :

- il y a trois fois plus de chauves-souris en Guyane tropicale que dans toute l’Europe méditerranéenne, tempérée et boréale ;
- pas d’insectivore en Guyane, mais il faut dire que leur niche écologique est occupée en partie par les petits marsupiaux des genres Monodelphis, Marmosops et Gracilinanus et par les petits rongeurs des genres Neusticomys et Nectomys.

En fait, la Guyane n’est pas la région amazonienne la plus favorable a une haute biodiversité de mammifères, comme 90% de la surface (85 000 km2) est occupé par un même écosytème, soit les forêts humides de plaine.



Tatou jaune Euphractus sexcinctus (Image Futura Sciences)

Très peu de savanes, limitées à une étroite bande côtière, ce qui explique peut-être l’absence d’espèces comme le tatou jaune Euphractus sexcinctus ou le renard des savanes Cerdocyon thous. Peu d’espèces inféodées aux zones marécageuses et herbeuses caractérisent la Guyane : la biche des palétuviers (Odocoileus caraicou) et le rat aquatique des marais (Holochilus sciureus) en sont deux bons exemples.



La plupart des espèces de mammifères ont une vaste distribution en Guyane française, comme le singe-araignée (Ateles paniscus), appellé « kwata » en créole. Gràce aux observations des naturalistes et biologistes, une base de données des localités de présence des mammifères de Guyane permet de rendre compte de la distribution des animaux a l’échelle du département.
©️ François Catzeflis

Pour le peu qu’on en sache, la plupart des mammifères forestiers sont distribués sur l’ensemble du territoire, bien que de vastes zones dans le sud et dans le centre de la Guyane n'aient pas encore été explorées suffisamment par des naturalistes.

Mais certains taxons ont une distribution beaucoup plus réduite, comme le tatou Cabassous unicinctus ou le singe Chiropotes satanas.


Futura Sciences 2008 - Edité sur LANE 2012

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On ne peut pas encore parler de fragmentation du massif
forestier en Guyane, bien heureusement. La Guyane couvre 85 000 km2, dont 80 000 = 94% sont des forêts intactes. De 1981 à 1990, seulement 30 KM2 ont été déforestés.

Quant a l’exploitation forestière, celle-ci ne concerne qu’environ 5% (4000 km2) de toute la surface boisée (Sanite, 1995), et elle est assez bien contrôlée par l’ONF. Certes, il y a au moins une cinquantaine de zones très dégradées, de forêts secondaires et d’ouvertures créées par l’homme (villages, abattis = potagers, sites miniers, surtout aurifères).

Environ les 2/3 de ces sites se localisent au Nord, sur la bande côtière, où réside plus de 80% de la population humaine.


Mais les atteintes à l’environnement sont néammoins
bien présentes en Guyane.
Certaines sont très visibles, comme l’inondation d’environ 360 km2 de forêts primaires pour la construction du barrage hydroélectrique de Petit Saut, ou encore les nouvelles routes telle celle rejoignant Kourou à Sinnamary sans passer par le Centre Spatial Guyanais.




La déforestation est encore faible en Guyane française, gràce à la vigilance et au « bon sens » de l’ONF et des autorités. Le lac artificiel de Petit-Saut, créé à l’occasion de la mise en eau du barrage, a recouvert quelques 360 km2 de forêts. Ce nouvel écosystème lacustro-forestier est étudié depuis quelques années par les hydrobiologistes locaux. ©️ François Catzeflis

D’autres atteintes sont beaucoup plus graves, mais peu ou pas visibles : les conséquences de l’orpaillage, légal et surtout illégal, entrainent une forte contamination de l’écosystème par le methyl-mercure.

Dans la région amont de Maripasoula, le long du Fleuve Maroni et de ses principaux affluents, plus de 60% des enfants amérindiens (qui fréquentent les dispensaires…) ont des teneurs en mercure qui dépassent les normes acceptables par l’OMS.


Aujourd’hui, avec un orpaillage clandestin hors de contrôle malgré de récents efforts des services de l’Etat, les forêts de Guyane sont littéralement mitées par les centaines – oui, centaines – de camps d’orpailleurs qui recherchent dans les berges et les sédiments des rivières les paillettes d’or.


Futura Sciences 2008 - Edité sur LANE 2012

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