Aller au contenu
Rechercher dans
  • Plus d’options…
Rechercher les résultats qui contiennent…
Rechercher les résultats dans…
BelleMuezza

Par deux fois, la ville de Singkil à Sumatra, engloutie par les eaux....

Messages recommandés

Partiellement engloutie par deux séismes rapprochés, la ville de Singkil à Sumatra avait déjà été reconstruite à quelque distance de son premier emplacement. L'ancienne cité avait en effet disparu sous les eaux au XIXe siècle. Cette histoire fait dire à certains que l'Atlantide se situerait en Indonésie.


L'engloutissement sous les eaux de l’ancienne et la nouvelle ville de Singkil [en 2005], à Aceh [sur la pointe nord de l'île de Sumatra] n’est pas sans rappeler l’histoire de l’Atlantide. Platon fut le premier à parler de cette île mythique dans le Timée et le Critias. Il raconte qu’elle aurait été engloutie par l’océan "en un jour et une nuit seulement".

Récemment, l’écrivain brésilien Arysio Nunes Dos Santos affirme dans son livre The Lost Continent Finally Found ("Le continent perdu enfin découvert", éd. North Atlantic Books, 2005) que l’Atlantide se trouverait en Indonésie. Cet ouvrage a suscité de nombreuses controverses, d’autant plus qu’un grand nombre de scientifiques et d’historiens considèrent l’Atlantide comme un simple conte inventé par Platon pour illustrer le caractère changeant et éphémère de toute civilisation.

Mais la ville de Singkil à Aceh n’est pas un mythe. C’est à la fois un fait historique et une réalité d’aujourd’hui. Il n’y a qu’à voir la mer qui chasse lentement mais sûrement toute vie de cette cité portuaire. Maisons, écoles, commissariats de police et mosquées s’enfoncent dans la terre, puis l’eau les submerge. Il semble bien que la nouvelle Singkil est en train de connaître le même sort que l’ancienne Singkil qui a disparu soudainement, avalée par l’océan Indien.

L’engloutissement de l’ancienne Singkil s’est produit en un instant, comme l’Atlantide racontée par Platon. Mais le processus s’est en réalité déployé sur des dizaines, voire des centaines d’années.

Selon le sismologue de l’Institut indonésien des sciences (LIPI), Danny Hilman, la plaque indo-australienne bouge de trente millimètres par an et fait pression sur la plaque Sumatera-Andama. "Quand la pression se relâche tel un arc, cela provoque un choc violent qu’on appelle tremblement de terre", estime le spécialiste Danny Hilman. Lorsque les îles sont soulevées par le séisme, les fonds marins suivent le même mouvement ascendant. Des millions de tonnes d’eau sont alors projetées à la surface, provoquant une onde gigantesque qui se propage dans toutes les directions et enfle en tsunami ou, selon la terminologie des habitants de Singkil, en "galoro".

Datuk Amirul Alam, un vieux sage de la nouvelle Singkil, affirme que l’ancienne Singkil était jadis un port prospère. Les habitants de l’intérieur de Sumatra y vendaient les produits de leurs terres tels que le bois, le rotin, le coprah, la résine et le camphre à d’importants marchands venus de Chine, d’Inde et du monde arabe.

Mais les seules traces qu’on trouve encore de Singkil l'Ancienne sont des débris de céramiques, des pièces de monnaie, des ruines de mur et des stèles funéraires à moitié immergées dans la mangrove. "Nous avons peur que la nouvelle Singkil disparaisse comme l’ancienne", avoue Sabaruddin, un habitant de Singkil.

Il n’existe pas de datation précise de l’engloutissement de Singkil l’Ancienne. Mais d’après les notes du négociant Mohammad Saleh dans son livre autobiographie Récit d’une vie et de ses souffrances, jusqu’au milieu du XIXe siècle, Singkil était encore un centre important de commerce. Vers 1861, Saleh navigua jusqu’à Singkil pour affaires. Il y demeura quelques jours, puis retourna en bateau à Pariaman, un entrepôt en pays Minangkabau (Sumatera ouest). "Me voilà à peine rentré, écrit-il, qu’une nouvelle m’arrive comme quoi le marché de Singkil a été englouti sous une vague gigantesque accompagnée d’un tremblement de terre. Et ce n’est pas que le marché qui a été fauché, même le cimetière a été balayé par la déferlante. Beaucoup de gens se sont enfuis vers le sud".

"Nos parents nous ont raconté maintes fois cette histoire de "galoro", précise Datuk Amirul Alam. "Mais ce n’est qu’après le tremblement de terre du 26 décembre 2004 que nous avons compris que le "galoro" c’était comme le tsunami".

Après avoir été frappés par le "galoro", les survivants de Singkil l’Ancienne se sont éloignés de l’estuaire du fleuve Singkil. Ils ont fondé une nouvelle ville, Singkil la Neuve, à 45 minutes en bateau à moteur en amont de Singkil l’Ancienne. Mais voilà que le 26 décembre 2004, Singkil la Neuve est secouée par un très violent séisme, suivi d’un autre le 25 mars 2005. Sous ce double choc tellurique, la ville a sombré.

Selon Danny Hilman, elle s’est enfoncée jusqu’à un mètre cinquante à certains endroits. Trois mille maisons ont été ensevelies suite à l’effondrement du socle terrestre. Les habitants ont dû tout abandonner à l’océan. Aujourd'hui, certains sont revenus et tentent de rehausser tant bien que mal leur demeure. Abnan Balok, 44 ans, raconte que cela fait trois fois qu’il surélève le sol de sa maison si bien que le plafond est de plus en plus bas.

La brutale disparition de Singkil l’Ancienne et l’inéluctable engloutissement de Singkil la Neuve montrent que l’Atlantide de Platon n’est sans doute pas une fiction.



Courrier International 04/06/2012

Partager ce message


Lien à poster
Partager sur d’autres sites

×
×
  • Créer...