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La vie de la banquise arctique se lit désormais dans les algues

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Quelle était l’étendue de la banquise arctique voici très exactement 511 ans par exemple ? Grâce à une algue rouge encroûtante, la réponse peut dorénavant être obtenue avec une précision inégalée à ce jour. La raison : Clathromorphum compactum dépose des couches de calcite en fonction de la température de l’eau et de la lumière solaire qu’elle reçoit.

Depuis la fin des années 1970, les changements saisonniers de surface de la banquise arctique sont scrupuleusement suivis par satellite. Nous savons ainsi que son étendue tend à se réduire progressivement en été au cours du temps (-13 % par décennie). Un record de fonte a même été battu le 16 septembre 2012, date à laquelle la surface de la glace de mer arctique n’a jamais été aussi petite depuis le début du suivi par satellite (3,41 millions de km2). Mais qu’est-il arrivé avant ?

  L’algue rouge encroûtante Clathromorphum compactum s’observe dans les régions côtières de l’Atlantique nord, du Pacifique nord et de l’océan Arctique. ©️ Nick Caloyianus

En réalité, les scientifiques disposent de données issues d’observations pour une période couvrant environ un siècle et demi, mais pas au-delà. Cela ne signifie pas pour autant qu’ils ne disposent d’aucune information. En effet, il leur a été possible de reconstruire diverses tendances grâce à l’utilisation de proxies indirects, ou indicateurs, ou de données sédimentaires, mais avec une précision temporelle toute relative, au grand dam des climatologues, qui voient ainsi la précision de certains de leurs modèles amoindrie.

Ils doivent donc se réjouir de l’annonce qui a été faite dans la revue Pnas. Des algues rouges enregistrent depuis des siècles, année après année, des informations sur les mouvements saisonniers de la mer de glace arctique. Cette découverte a été réalisée puis exploitée grâce à la création d’un protocole adapté par Jochen Halfar de l’université de Toronto à Mississauga (UTM, Canada) et plusieurs collaborateurs. Le végétal en question se nomme Clathromorphum compactum. Il se développe sur les fonds marins des océans Arctique et subarctiques à une profondeur de 15 à 17 m, parfois durant plusieurs siècles. Mais où est l’astuce ?

  Sur cette coupe réalisée dans une algue rouge encroûtante Clathromorphum compactum, les lignes vertes trahissent la présence de magnésium déposé en été dans la calcite, lorsqu’il fait chaud et que de la lumière solaire parvient sur les fonds marins. Les lignes bleues sont caractéristiques des dépôts faits à basse température. En les étudiant, il est ici possible d’estimer durant combien de temps l’algue a reçu de la lumière chaque année durant sept ans (il y a sept lignes vertes exploitables). La hauteur de l’image correspond en réalité à un millimètre. ©️ Andreas Kronz

Il s’agit en réalité d’une algue rouge dite encroûtante, ce qui signifie qu’elle produit des dépôts de calcite lorsqu’elle grandit sous des conditions de température et de luminosité minimales. Ainsi, sa croissance cesse lorsque de la glace se développe à la surface de l’eau, donc quand la température du milieu diminue puis qu’une accumulation de neige finit par plonger les fonds marins dans l’obscurité. À l’inverse, elle reprend son développement lorsque la banquise disparaît. Dernier détail : la quantité de magnésium intégrée dans la calcite en un point précis est également liée à la température de l’eau et à la lumière.

Ainsi, pour étudier la croissance et la décroissance saisonnière de la banquise arctique au cours des siècles passés, des algues ont été prélevées lors d’expéditions océanographiques, avant d’être sectionnées en coupes fines polies puis observées au microscope. Les cycles de dormance et de développement sont alors apparus sur la forme d’une succession de lignes, exactement comme dans un arbre. En observant la présence du magnésium dans chaque strie de croissance, il a alors été possible d’estimer le nombre approximatif de jours ensoleillés que les algues ont vécus année après année, et donc par déduction le nombre de jours qu’elles ont passés dans l’obscurité sous la glace. Grâce à l’un des échantillons, les scientifiques ont pu remonter jusqu’à 646 ans en arrière !

Au final, ils ont souligné l’existence d’une banquise relativement étendue durant le petit âge glaciaire, ce qui n’a pas empêché sa surface de fortement varier à une échelle subdécennale. Durant cette période, soit environ entre 1550 et 1850, les stries ont présenté une épaisseur moyenne de 30 µm. Cette valeur a plus que doublé par la suite, entre 1850 et les années 2000, prouvant ainsi l'existence d'un long déclin de la couverture glaciaire arctique, en accord avec nos connaissances actuelles. Voilà donc une nouvelle méthode de reconstruction climatique haute résolution qui nous permettra peut-être d’obtenir de meilleures prévisions sur l’évolution du climat passé, mais aussi pour celui à venir.


Futura sciences 24/11/2013

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